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- Bodevéno, Pluvigner, Morbihan

Une étude bloquée par le préfet pourrait être obtenue par les opposants à une zone commerciale
Le rapporteur public du tribunal administratif a préconisé d'accéder à la demande d'un élu de Pluvigner (Morbihan) de se voir communiquer une analyse environnementale.
Le feuilleton judiciaire de ce projet de zone commerciale à Pluvigner dans le Morbihan n’est pas terminé.
Jean-Michel Le Cam, seul élu d’opposition au conseil municipal de Pluvigner, membre de la commission juridique d’Eaux et Rivières de Bretagne (ERB) avait décidé, avec des amis, de monter une liste pour les élections municipales de 2020 dans la perspective même de s’opposer au projet de zone commerciale.
La biodiversité en question
Après avoir été bloqué « pendant deux ans », le projet est désormais en bonne voie pour se concrétiser, en dépit des multiples recours intentés par les associations de protection de l’environnement et du patrimoine : le 23 septembre 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a autorisé les porteurs du projet du centre commercial Terr’Océan à poursuivre leurs travaux d’aménagement controversés.
Pour rappel, dans cette affaire, le permis d’aménager initial du centre commercial de la zone de Bodevéno avait été délivré par le maire de Pluvigner en décembre 2019 à la société civile immobilière (SCI) des Landes, détenue indirectement par Carl Saint-Jalmes, le patron du Super U. Un permis d’aménager « modificatif » avait ensuite scindé en deux un bâtiment « afin d’éviter pour majeure partie la haie centrale présente sur le site » ; un « cheminement piétonnier » avait aussi été reculé et un parking supprimé « pour conserver une zone tampon herbacée » entre cette haie et les premiers aménagements.
Un « élagage léger » effectue malgré l’interdiction
Bretagne Vivante et PARé! (Pluvigner Aspect Respect Equilibre) avaient alors introduit un recours le 22 août 2024 pour que la préfecture du Morbihan ordonne « l’interruption provisoire et sans délai » du chantier en raison, selon les plaignants, de premiers travaux ont faits « en méconnaissance flagrante » de toutes les mesures destinées à atténuer leur impact sur la faune et la flore.
« Cette méconnaissance, dont la réalité et l’ampleur ne sont aucunement contestées (…), sont confirmées par (…) l’Office français de la biodiversité (OFB) : elle obligeait l’autorité préfectorale à réévaluer le risque d’atteinte aux espèces protégées », avait plaidé l’avocat des associations de défense de l’environnement, Me Thomas Dubreuil.
Les atermoiements du préfet
A l’époque, l’avocat de la société par actions simplifiées (SAS) Carega de Carl Saint-Jalmes, n’avait effectivement pas nié cette cette « méconnaissance » mais avait simplement fait valoir qu’elle n’avait « pas généré d’atteinte significative aux espèces protégées ». Seul un « élagage léger » de la haie centrale avait été fait le 26 août 2024, même si « aucun élagage » ne devait normalement être fait avant le 31 août 2024… Mais il s’agissait simplement de « sanctuariser la haie par la pose d’une clôture », expliquait Me Bernard Cazin.
Après ce désaveu judiciaire, Jean-Michel Le Cam avait sollicité la « communication de l’entier dossier d’analyse du permis d’aménager modificatif » pour comprendre ce qui avait pu dispenser les porteurs du projet de « dérogation à l’interdiction de destruction des espèces protégées ».
Un « accord de principe » finalement retiré
Mais une « décision implicite de rejet » était née du silence gardé par le préfet du Morbihan, malgré un premier « accord » de principe donné par une « responsable de service » de l’administration contactée par l’élu. Elle devait « voir avec sa hiérarchie » mais avait fini par lui expliquer qu’il n’obtiendrait ces documents qu’en saisissant la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA).
Ce qu’avait fait l’élu d’opposition : il avait reçu « un avis favorable » mais ensuite « rien », a-t-il soufflé à l’audience devant le tribunal administratif. « Ce ne sont pas des documents exceptionnels et j’ai très franchement le sentiment d’encombrer inutilement votre juridiction », a-t-il confié aux juges, à qui il réclamait donc d’ordonner la communication des documents sollicités « sous astreinte de 150 € par jour de retard ».
« Le préfet a méconnu le code de l’environnement et le code des relations entre le public et l’administration «
Ces documents concernent « des activités susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement« , a confirmé le rapporteur public lors de l’audience. Selon le magistrat chargé de former des préconisations au tribunal, le préfet a « méconnu » le code de l’environnement et le code des relations entre le public et l’administration (CRPA). Il a donc préconisé d’annuler la « décision implicite de refus de communiquer les documents », et notamment « les éléments portant sur la dérogation espèces protégées« . Il a aussi proposé aux juges de fixer un « délai d’un mois » pour le préfet, mais sans « astreinte » financière en cas de retard.
Jean-Michel Le Cam considère que le porteur du projet ne pouvait pas « obtenir la dérogation » puisqu’il faut « démontrer un intérêt public majeur » de nature à la justifier. Or « c’est un intérêt privé » qui prévaut dans l’affaire de la ZAC de Bodevéno, affirme-t-il. Si le tribunal venait à le suivre en ordonnant la « communication » de ces documents, il espère pouvoir trouver de nouvelles failles juridiques dans le projet. Et continuer de s’y opposer.